Le Dépit Amoureux » Acte III » Scene VI
POLYDORE, VALÈRE. POLYDORE Enfin, le beau mignon, vos bons déportements*Troubleront les vieux jours d'un père à tous moments.Tous les jours vous ferez de nouvelles merveilles, 910 Et nous n'aurons jamais autre chose aux oreilles. VALÈRE Que fais-je tous les jours qui soit si criminel ?En quoi mériter tant le courroux paternel ? POLYDORE Je suis un étrange homme, et d'une humeur terrible,D'accuser un enfant si sage et si paisible. 915 Las! il vit comme un saint, et dedans la maisonDu matin jusqu'au soir il est en oraison.Dire qu'il pervertit l'ordre de la nature,Et fait du jour la nuit, oh! la grande imposture!Qu'il n'a considéré père, ni parenté 920 En vingt occasions, horrible fausseté!Que, de fraiche mémoire, un furtif hyménée*À la fille d'Albert a joint sa destinée,Sans craindre de la suite un désordre puissant,On le prend pour un autre, et le pauvre innocent 925 Ne sait pas seulement ce que je lui veux dire!Ha! chien, que j'ai reçu du ciel pour mon martyre,Te croiras-tu toujours*? et ne pourrai-je pas,Te voir être une fois sage avant mon trépas? VALÈRE, seul*. D'où peut venir ce coup ? mon âme embarrassée 930 Ne voit que Mascarille où jeter sa pensée:Il ne sera pas homme à m'en faire un aveu;Il faur user d'adresse, et me contraindre un peuDans ce juste courroux.
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