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Actes de l'oeuvre
Monsieur de Pourceaugnac :

¤Acte 1
ºSCÈNE PREMIËRE
ºSCÈNE II
ºSCÈNE III
ºSCÈNE IV
ºSCÈNE V
ºSCÈNE VI
ºSCÈNE VII
ºSCÈNE VIII
ºSCÈNE IX
ºSCÈNE X
ºSCÈNE XI
¤Acte 2
¤Acte 3
 
 

 

Monsieur de Pourceaugnac » Acte 1 » SCÈNE IV

ÉRASTE, SBRIGANI, MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

ÉRASTE.- Ah qu'est-ce ci*! que vois-je! Quelle heureuse rencontre! Monsieur de Pourceaugnac! que je suis ravi de vous voir! Comment? il semble que vous ayez peine à me reconnaître?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Monsieur, je suis votre serviteur.

ÉRASTE.- Est-il possible que cinq ou six années m'aient ôté de votre mémoire? et que vous ne reconnaissiez pas le meilleur ami de toute la famille des Pourceaugnac?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Pardonnez-moi. (À Sbrigani.) Ma foi, je ne sais qui il est.

ÉRASTE.- Il n'y a pas un Pourceaugnac à Limoges que je ne connaisse depuis le plus grand jusques au plus petit; je ne fréquentais qu'eux dans le temps que j'y étais, et j'avais l'honneur de vous voir presque tous les jours.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- C'est moi qui l'ai reçu*, Monsieur.

ÉRASTE.- Vous ne vous remettez point mon visage?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Si fait. (À Sbrigani.) Je ne le connais point.

ÉRASTE.- Vous ne vous ressouvenez pas que j'ai eu le bonheur de boire avec vous je ne sais combien de fois*?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Excusez-moi. (À Sbrigani.) Je ne sais ce que c'est.

ÉRASTE.- Comment appelez-vous ce traiteur de Limoges qui fait si bonne chère?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Petit-Jean?

ÉRASTE.- Le voilà. Nous allions le plus souvent ensemble chez lui nous réjouir. Comment est-ce que vous nommez à Limoges ce lieu où l'on se promène?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Le cimetière des Arènes?

ÉRASTE.- Justement; c'est où je passais de si douces heures à jouir de votre agréable conversation. Vous ne vous remettez pas tout cela?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Excusez-moi, je me le remets. (À Sbrigani.) Diable emporte, si je m'en souviens.

SBRIGANI.- Il y a cent choses comme cela qui passent de la tête.

ÉRASTE.- Embrassez-moi donc, je vous prie, et resserrons les nœuds de notre ancienne amitié.

SBRIGANI.- Voilà un homme qui vous aime fort.

ÉRASTE.- Dites-moi un peu des nouvelles de toute la parenté: comment se porte Monsieur votre... là... qui est si honnête homme?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Mon frère le consul?

ÉRASTE.- Oui.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Il se porte le mieux du monde.

ÉRASTE.- Certes j'en suis ravi. Et celui qui est de si bonne humeur? là... Monsieur votre...?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Mon cousin l'assesseur*?

ÉRASTE.- Justement.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Toujours gai et gaillard.

ÉRASTE.- Ma foi, j'en ai beaucoup de joie. Et Monsieur votre oncle? le....

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Je n'ai point d'oncle.

ÉRASTE.- Vous en aviez pourtant en ce temps-là...

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Non, rien qu'une tante.

ÉRASTE.- C'est ce que je voulais dire, Madame votre tante; comment se porte-t-elle?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Elle est morte depuis six mois.

ÉRASTE.- Hélas la pauvre femme! elle était si bonne personne.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Nous avons aussi mon neveu le chanoine, qui a pensé mourir de la petite vérole.

ÉRASTE.- Quel dommage ç'aurait été!

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Le connaissez-vous aussi?

ÉRASTE.- Vraiment si je le connais! Un grand garçon bien fait.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Pas des plus grands.

ÉRASTE.- Non, mais de taille bien prise.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Eh oui.

ÉRASTE.- Qui est votre neveu...

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Oui.

ÉRASTE.- Fils de votre frère et de votre sœur*...

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Justement.

ÉRASTE.- Chanoine de l'église de... comment l'appelez-vous?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- De Saint-Etienne.

ÉRASTE.- Le voilà, je ne connais autre.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Il dit toute la parenté*.

SBRIGANI.- Il vous connaît plus que vous ne croyez.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- À ce que je vois, vous avez demeuré longtemps dans notre ville?

ÉRASTE.- Deux ans entiers.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Vous étiez donc là quand mon cousin l'élu, fit tenir son enfant à Monsieur notre gouverneur*?

ÉRASTE.- Vraiment oui, j'y fus convié des premiers.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Cela fut galant.

ÉRASTE.- Très galant*.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- C'était un repas bien troussé.

ÉRASTE.- Sans doute.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Vous vîtes donc aussi la querelle que j'eus avec ce gentilhomme périgordin?

ÉRASTE.- Oui.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Parbleu il trouva à qui parler.

ÉRASTE.- Ah, ah!

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Il me donna un soufflet, mais je lui dis bien son fait.

ÉRASTE.- Assurément. Au reste, je ne prétends pas* que vous preniez d'autre logis que le mien.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Je n'ai garde de...

ÉRASTE.- Vous moquez-vous? Je ne souffrirai point du tout que mon meilleur ami soit autre part que dans ma maison.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Ce serait vous...

ÉRASTE.- Non: le diable m'emporte*, vous logerez chez moi.

SBRIGANI.- Puisqu'il le veut obstinément, je vous conseille d'accepter l'offre.

ÉRASTE.- Où sont vos hardes?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Je les ai laissées avec mon valet où je suis descendu.

ÉRASTE.- Envoyons-les quérir par quelqu'un.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Non: je lui ai défendu de bouger, à moins que j'y fusse moi-même, de peur de quelque fourberie.

SBRIGANI.- C'est prudemment avisé.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Ce pays-ci est un peu sujet à caution.

ÉRASTE.- On voit les gens d'esprit en tout.

SBRIGANI.- Je vais accompagner Monsieur, et le ramènerai où vous voudrez.

ÉRASTE.- Oui, je serai bien aise de donner quelques ordres, et vous n'avez qu'à revenir à cette maison-là.

SBRIGANI.- Nous sommes à vous tout à l'heure.

ÉRASTE.- Je vous attends avec impatience.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Voilà une connaissance où je ne m'attendais point.

SBRIGANI.- Il a la mine d'être honnête homme.

ÉRASTE, seul.- Ma foi, Monsieur de Pourceaugnac, nous vous en donnerons de toutes les façons; les choses sont préparées, et je n'ai qu'à frapper*.