George Dandin ou le mari confondu » Acte 2 » SCÈNE VII
MONSIEUR ET MADAME DE SOTENVILLE, GEORGE DANDIN.GEORGE DANDIN.- Enfin vous ne m'avez pas voulu croire tantôt, et votre fille l'a emporté sur moi. Mais j'ai en main de quoi vous faire voir comme elle m'accommode*, et Dieu merci mon déshonneur est si clair maintenant, que vous n'en pourrez plus douter.MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Comment, mon gendre, vous êtes encore là-dessus*?GEORGE DANDIN.- Oui j'y suis, et jamais je n'eus tant de sujet d'y être.MADAME DE SOTENVILLE.- Vous nous venez encore étourdir la tête?GEORGE DANDIN.- Oui, Madame, et l'on fait bien pis à la mienne.MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Ne vous lassez-vous point de vous rendre importun?GEORGE DANDIN.- Non. Mais je me lasse fort d'être pris pour dupe.MADAME DE SOTENVILLE.- Ne voulez-vous point vous défaire de vos pensées extravagantes?GEORGE DANDIN.- Non, Madame, mais je voudrais bien me défaire d'une femme qui me déshonore.MADAME DE SOTENVILLE.- Jour de Dieu, notre gendre, apprenez à parler.MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Corbleu cherchez des termes moins offensants que ceux-là.GEORGE DANDIN.- Marchand qui perd ne peut rire.MADAME DE SOTENVILLE.- Souvenez-vous que vous avez épousé une Demoiselle.GEORGE DANDIN.- Je m'en souviens assez, et ne m'en souviendrai que trop.MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Si vous vous en souvenez, songez donc à parler d'elle avec plus de respect.GEORGE DANDIN.- Mais que ne songe-t-elle plutôt à me traiter plus honnêtement? Quoi parce qu'elle est Demoiselle, il faut qu'elle ait la liberté de me faire ce qui lui plaît, sans que j'ose souffler?MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Qu'avez-vous donc, et que pouvez-vous dire? N'avez-vous pas vu ce matin qu'elle s'est défendue de connaître celui dont vous m'étiez venu parler?GEORGE DANDIN.- Oui. Mais vous, que pourrez-vous dire, si je vous fais voir maintenant que le galant est avec elle?MADAME DE SOTENVILLE.- Avec elle?GEORGE DANDIN.- Oui avec elle, et dans ma maison?MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Dans votre maison?GEORGE DANDIN.- Oui. Dans ma propre maison.MADAME DE SOTENVILLE.- Si cela est, nous serons pour vous contre elle.MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Oui. L'honneur de notre famille nous est plus cher que toute chose, et si vous dites vrai, nous la renoncerons pour notre sang, et l'abandonnerons à votre colère.GEORGE DANDIN.- Vous n'avez qu'à me suivre.MADAME DE SOTENVILLE.- Gardez de vous tromper.MONSIEUR DE SOTENVILLE.- N'allez pas faire comme tantôt.GEORGE DANDIN.- Mon Dieu, vous allez voir. Tenez. Ai-je menti?
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