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Actes de l'oeuvre
Psyché :

¤Acte 1
ºPROLOGUE
ºSCÈNE PREMIÈRE
ºSCÈNE II
ºSCÈNE III
ºSCÈNE IV
ºSCÈNE V
ºSCÈNE VI
¤Acte 2
¤Acte 3
¤Acte 4
¤Acte 5
 
 

 

Psyché » Acte 1 » SCÈNE III

PSYCHÉ, CIDIPPE, AGLAURE, CLÉOMÈNE, AGÉNOR.


CIDIPPE
Venez jouir, ma sœur, de ce qu'on vous apprête.

AGLAURE
385 Préparez vos attraits à recevoir ici
Le triomphe nouveau d'une illustre conquête.

CIDIPPE
Ces princes ont tous deux si bien senti vos coups,
Qu'à vous le découvrir leur bouche se dispose.

PSYCHÉ
Du sujet qui les tient si rêveurs parmi nous
390 Je ne me croyais pas la cause,
Et j'aurais cru toute autre chose
En les voyant parler à vous.

AGLAURE
N'ayant ni beauté, ni naissance
À pouvoir mériter leur amour et leurs soins,
395 Ils nous favorisent au moins
De l'honneur de la confidence.

CLÉOMÈNE
L'aveu qu'il nous faut faire à vos divins appas,
Est sans doute, Madame, un aveu téméraire;
Mais tant de cœurs près du trépas,
400 Sont par de tels aveux forcés à vous déplaire,
Que vous êtes réduite à ne les punir pas
Des foudres de votre colère.
Vous voyez en nous deux amis,
Qu'un doux rapport d'humeurs sut joindre dès l'enfance;
405 Et ces tendres liens se sont vus affermis
Par cent combats d'estime et de reconnaissance.
Du Destin ennemi les assauts rigoureux,
Les mépris de la mort, et l'aspect des supplices,
Par d'illustres éclats de mutuels offices
410 Ont de notre amitié signalé les beaux nœuds:
Mais à quelques essais qu'elle se soit trouvée,
Son grand triomphe est en ce jour,
Et rien ne fait tant voir sa constance éprouvée,
Que de se conserver au milieu de l'amour.
415 Oui, malgré tant d'appas, son illustre constance
Aux lois qu'elle nous fait, a soumis tous nos vœux;
Elle vient d'une douce et pleine déférence
Remettre à votre choix le succès de nos feux,
Et pour donner un poids à notre concurrence,
420 Qui des raisons d'État entraîne la balance
Sur le choix de l'un de nous deux,
Cette même amitié s'offre sans répugnance
D'unir nos deux États au sort du plus heureux.

AGÉNOR
Oui, de ces deux États, Madame,
425 Que sous votre heureux choix nous nous offrons d'unir,
Nous voulons faire à notre flamme
Un secours pour vous obtenir.
Ce que pour ce bonheur, près du Roi votre père
Nous nous sacrifions tous deux,
430 N'a rien de difficile à nos cœurs amoureux,
Et c'est au plus heureux faire un don nécessaire
D'un pouvoir dont le malheureux,
Madame, n'aura plus affaire.

PSYCHÉ
Le choix que vous m'offrez, Princes, montre à mes yeux
435 De quoi remplir les vœux de l'âme la plus fière,
Et vous me le parez tous deux d'une manière,
Qu'on ne peut rien offrir qui soit plus précieux.
Vos feux, votre amitié, votre vertu suprême,
Tout me relève en vous l'offre de votre foi,
440 Et j'y vois un mérite à s'opposer lui-même
À ce que vous voulez de moi.
Ce n'est pas à mon cœur qu'il faut que je défère
Pour entrer sous de tels liens;
Ma main, pour se donner, attend l'ordre d'un père,
445 Et mes sœurs ont des droits qui vont devant les miens.
Mais si l'on me rendait sur mes vœux absolue,
Vous y pourriez avoir trop de part à la fois,
Et toute mon estime entre vous suspendue,
Ne pourrait sur aucun laisser tomber mon choix.
450 À l'ardeur de votre poursuite
Je répondrais assez de mes vœux les plus doux;
Mais c'est parmi tant de mérite
Trop que deux cœurs pour moi, trop peu qu'un cœur pour vous.
De mes plus doux souhaits j'aurais l'âme gênée
455 À l'effort de votre amitié,
Et j'y vois l'un de vous prendre une destinée
À me faire trop de pitié.
Oui, Princes, à tous ceux dont l'amour suit le vôtre,
Je vous préférerais tous deux avec ardeur;
460 Mais je n'aurais jamais le cœur
De pouvoir préférer l'un de vous deux à l'autre.
À celui que je choisirais,
Ma tendresse ferait un trop grand sacrifice,
Et je m'imputerais à barbare injustice
465 Le tort qu'à l'autre je ferais.
Oui, tous deux vous brillez de trop de grandeur d'âme,
Pour en faire aucun malheureux,
Et vous devez chercher dans l'amoureuse flamme
Le moyen d'être heureux tous deux.
470 Si votre cœur me considère
Assez pour me souffrir de disposer de vous,
J'ai deux sœurs capables de plaire,
Qui peuvent bien vous faire un destin assez doux,
Et l'amitié me rend leur personne assez chère,
475 Pour vous souhaiter leurs époux.

CLÉOMÈNE
Un cœur dont l'amour est extrême
Peut-il bien consentir, hélas,
D'être donné par ce qu'il aime?
Sur nos deux cœurs, Madame, à vos divins appas
480 Nous donnons un pouvoir suprême,
Disposez-en pour le trépas,
Mais pour une autre que vous-même
Ayez cette bonté de n'en disposer pas.

AGÉNOR
Aux Princesses, Madame, on ferait trop d'outrage,
485 Et c'est pour leurs attraits un indigne partage,
Que les restes d'une autre ardeur;
Il faut d'un premier feu la pureté fidèle,
Pour aspirer à cet honneur
Où votre bonté nous appelle,
490 Et chacune mérite un cœur
Qui n'ait soupiré que pour elle.

AGLAURE
Il me semble, sans nul courroux,
Qu'avant que de vous en défendre,
Princes, vous deviez bien attendre
495 Qu'on se fût expliqué sur vous.
Nous croyez-vous un cœur si facile et si tendre?
Et lorsqu'on parle ici de vous donner à nous,
Savez-vous si l'on veut vous prendre?

CIDIPPE
Je pense que l'on a d'assez hauts sentiments
500 Pour refuser un cœur qu'il faut qu'on sollicite,
Et qu'on ne veut devoir qu'à son propre mérite
La conquête de ses amants.

PSYCHÉ
J'ai cru pour vous, mes sœurs, une gloire assez grande,
Si la possession d'un mérite si haut...