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Actes de l'oeuvre
Monsieur de Pourceaugnac :

¤Acte 1
¤Acte 2
ºSCÈNE PREMIERE
ºSCÈNE II
ºSCÈNE III
ºSCÈNE IV
ºSCÈNE V
ºSCÈNE VI
ºSCÈNE VII
ºSCÈNE VIII
ºSCÈNE IX
ºSCÈNE X
ºSCÈNE XI
¤Acte 3
 
 

 

Monsieur de Pourceaugnac » Acte 2 » SCÈNE IV

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC, SBRIGANI.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Piglia-lo sù, piglia-lo sù, Signor Monsu. Que diable est-ce là? Ah!

SBRIGANI.- Qu'est-ce, Monsieur, qu'avez-vous?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Tout ce que je vois, me semble lavement.

SBRIGANI.- Comment?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Vous ne savez pas ce qui m'est arrivé dans ce logis à la porte duquel vous m'avez conduit?

SBRIGANI.- Non vraiment, qu'est-ce que c'est?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Je pensais y être régalé comme il faut.

SBRIGANI.- Hé bien?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Je vous laisse entre les mains de Monsieur. Des médecins habillés de noir. Dans une chaise. Tâter le pouls. Comme ainsi soit. Il est fou. Deux gros joufflus. Grands chapeaux. Bon di, bon di. Six pantalons. Ta, ra, ta, ta: Ta, ra, ta, ta. Alegramente Monsu Pourceaugnac. Apothicaire. Lavement. Prenez, Monsieur, prenez, prenez. Il est bénin, bénin, bénin. C'est pour déterger, pour déterger, déterger. Piglia-lo sù, Signor Monsu, piglia-lo, piglia-lo, piglia-lo sù. Jamais je n'ai été si soûl de sottises.

SBRIGANI.- Qu'est-ce que tout cela veut dire?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Cela veut dire que cet homme-là, avec ses grandes embrassades, est un fourbe qui m'a mis dans une maison pour se moquer de moi, et me faire une pièce*.

SBRIGANI.- Cela est-il possible?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Sans doute, ils étaient une douzaine de possédés après mes chausses; et j'ai eu toutes les peines du monde à m'échapper de leurs pattes.

SBRIGANI.- Voyez un peu, les mines sont bien trompeuses! Je l'aurais cru le plus affectionné de vos amis. Voilà un de mes étonnements, comme il est possible qu'il y ait des fourbes comme cela dans le monde.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Ne sens-je point le lavement? Voyez, je vous prie.

SBRIGANI.- Eh il y a quelque petite chose qui approche de cela.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- J'ai l'odorat et l'imagination toute remplie de cela, et il me semble toujours que je vois une douzaine de lavements qui me couchent en joue.

SBRIGANI.- Voilà une méchanceté bien grande! et les hommes sont bien traîtres et scélérats!

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Enseignez-moi, de grâce, le logis de Monsieur Oronte; je suis bien aise d'y aller tout à l'heure.

SBRIGANI.- Ah, ah, vous êtes donc de complexion amoureuse, et vous avez ouï parler que ce Monsieur Oronte a une fille...

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Oui, je viens l'épouser.

SBRIGANI.- L'é... L'épouser?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Oui.

SBRIGANI.- En mariage?

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- De quelle façon donc?

SBRIGANI.- Ah c'est une autre chose, et je vous demande pardon.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Qu'est-ce que cela veut dire?

SBRIGANI.- Rien.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Mais encore?

SBRIGANI.- Rien, vous dis-je; j'ai un peu parlé trop vite.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Je vous prie de me dire ce qu'il y a là-dessous.

SBRIGANI.- Non, cela n'est pas nécessaire.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- De grâce.

SBRIGANI.- Point, je vous prie de m'en dispenser.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Est-ce que vous n'êtes pas de mes amis?

SBRIGANI.- Si fait, on ne peut pas l'être davantage.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Vous devez donc ne me rien cacher.

SBRIGANI.- C'est une chose où il y va de l'intérêt du prochain.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Afin de vous obliger à m'ouvrir votre cœur, voilà une petite bague que je vous prie de garder pour l'amour de moi.

SBRIGANI.- Laissez-moi consulter un peu si je le puis faire en conscience. C'est un homme qui cherche son bien, qui tâche de pourvoir sa fille le plus avantageusement qu'il est possible, et il ne faut nuire à personne. Ce sont des choses qui sont connues à la vérité, mais j'irai les découvrir à un homme qui les ignore, et il est défendu de scandaliser* son prochain. Cela est vrai; mais d'autre part voilà un étranger qu'on veut surprendre, et qui de bonne foi vient se marier avec une fille qu'il ne connaît pas, et qu'il n'a jamais vue; un gentilhomme plein de franchise, pour qui je me sens de l'inclination, qui me fait l'honneur de me tenir pour son ami, prend confiance en moi, et me donne une bague à garder pour l'amour de lui. Oui, je trouve que je puis vous dire les choses sans blesser ma conscience; mais tâchons de vous les dire le plus doucement qu'il nous sera possible, et d'épargner les gens le plus que nous pourrons. De vous dire que cette fille-là mène une vie déshonnête, cela serait un peu trop fort; cherchons pour nous expliquer, quelques termes plus doux. Le mot de galante aussi n'est pas assez; celui de coquette achevée, me semble propre à ce que nous voulons, et je m'en puis servir, pour vous dire honnêtement ce qu'elle est.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- L'on me veut donc prendre pour dupe?

SBRIGANI.- Peut-être dans le fond n'y a-t-il pas tant de mal que tout le monde croit; et puis il y a des gens, après tout, qui se mettent au-dessus de ces sortes de choses, et qui ne croient pas que leur honneur dépende...

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Je suis votre serviteur, je ne me veux point mettre sur la tête un chapeau comme celui-là, et l'on aime à aller le front levé dans la famille des Pourceaugnac.

SBRIGANI.- Voilà le père.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.- Ce vieillard-là?

SBRIGANI.- Oui, je me retire.