Amphitryon » Acte 3 » SCÈNE VII
AMPHITRYON, ARGATIPHONTIDAS, POSICLÈS, SOSIE. AMPHITRYON Arrêtez là, Messieurs. Suivez-nous d'un peu loin;Et n'avancez tous, je vous prie,Que quand il en sera besoin. POSICLÈS Je comprends que ce coup doit fort toucher votre âme. AMPHITRYON 1815 Ah! de tous les côtés, mortelle est ma douleur!Et je souffre pour ma flamme,Autant que pour mon honneur. POSICLÈS Si cette ressemblance est telle que l'on dit,Alcmène, sans être coupable... AMPHITRYON 1820 Ah! sur le fait dont il s'agit,L'erreur simple devient un crime véritable,Et sans consentement, l'innocence y périt.De semblables erreurs, quelque jour qu'on leur donne,Touchent des endroits délicats: 1825 Et la raison bien souvent les pardonne;Que l'honneur, et l'amour, ne les pardonnent pas. ARGATIPHONTIDAS Je n'embarrasse point là dedans ma pensée:Mais je hais vos Messieurs, de leurs honteux délais;Et c'est un procédé, dont j'ai l'âme blessée; 1830 Et que les gens de cœur n'approuveront jamais.Quand quelqu'un nous emploie, on doit, tête baissée,Se jeter dans ses intérêts.Argatiphontidas ne va point aux accords.Écouter d'un ami raisonner l'adversaire, 1835 Pour des hommes d'honneur, n'est point un coup à faire:Il ne faut écouter que la vengeance alors.Le procès ne me saurait plaire;Et l'on doit commencer toujours dans ses transports,Par bailler, sans autre mystère*, 1840 De l'épée au travers du corps.Oui, vous verrez, quoi qu'il advienne*,Qu'Argatiphontidas marche droit sur ce point;Et de vous il faut que j'obtienne,Que le pendard ne meure point, 1845 D'une autre main, que de la mienne. AMPHITRYON Allons. SOSIE Je viens, Monsieur, subir à vos genoux, Le juste châtiment d'une audace maudite.Frappez, battez, chargez, accablez-moi de coups;Tuez-moi dans votre courroux: 1850 Vous ferez bien, je le mérite;Et je n'en dirai pas un seul mot contre vous. AMPHITRYON Lève-toi. Que fait-on? SOSIE L'on m'a chassé tout net: Et croyant, à manger, m'aller comme eux, ébattre,Je ne songeais pas qu'en effet, 1855 Je m'attendais là, pour me battre.Oui, l'autre moi, valet de l'autre vous, a fait,Tout de nouveau, le diable à quatre,La rigueur d'un pareil destin,Monsieur, aujourd'hui, nous talonne; 1860 Et l'on me des-Sosie enfin,Comme on vous dés-Amphitryonne. AMPHITRYON Suis-moi. SOSIE N'est-il pas mieux, de voir s'il vient personne.
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