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Actes de l'oeuvre
Le bourgeois gentilhomme :

¤Acte 1
¤Acte 2
¤Acte 3
ºSCÈNE PREMIÈRE
ºSCÈNE II
ºSCÈNE III
ºSCÈNE IV
ºSCÈNE V
ºSCÈNE VI
ºSCÈNE VII
ºSCÈNE VIII
ºSCÈNE IX
ºSCÈNE X
ºSCÈNE XI
ºSCÈNE XII
ºSCÈNE XIII
ºSCÈNE XIV
ºSCÈNE XV
ºSCÈNE XVI
¤Acte 4
¤Acte 5
 
 

 

Le bourgeois gentilhomme » Acte 3 » SCÈNE X

CLÉONTE, LUCILE, COVIELLE, NICOLE.

NICOLE.- Pour moi, j'en ai été toute scandalisée.

LUCILE.- Ce ne peut être, Nicole, que ce que je dis. Mais le voilà.

CLÉONTE.- Je ne veux pas seulement lui parler.

COVIELLE.- Je veux vous imiter.

LUCILE.- Qu'est-ce donc, Cléonte? qu'avez-vous?

NICOLE.- Qu'as-tu donc, Covielle?

LUCILE.- Quel chagrin vous possède?

NICOLE.- Quelle mauvaise humeur te tient?

LUCILE.- Êtes-vous muet, Cléonte?

NICOLE.- As-tu perdu la parole, Covielle?

CLÉONTE.- Que voilà qui est scélérat!

COVIELLE.- Que cela est Judas!

LUCILE.- Je vois bien que la rencontre de tantôt a troublé votre esprit.

CLÉONTE.- Ah, ah, on voit ce qu'on a fait.

NICOLE.- Notre accueil de ce matin t'a fait prendre la chèvre*.

COVIELLE.- On a deviné l'encloure*.

LUCILE.- N'est-il pas vrai, Cléonte, que c'est là le sujet de votre dépit?

CLÉONTE.- Oui, perfide, ce l'est, puisqu'il faut parler; et j'ai à vous dire que vous ne triompherez pas comme vous pensez de votre infidélité, que je veux être le premier à rompre avec vous, et que vous n'aurez pas l'avantage de me chasser. J'aurai de la peine, sans doute, à vaincre l'amour que j'ai pour vous; cela me causera des chagrins: je souffrirai un temps; mais j'en viendrai à bout, et je me percerai plutôt le cœur, que d'avoir la faiblesse de retourner à vous.

COVIELLE.- Queussi, queumi*.

LUCILE.- Voilà bien du bruit pour un rien. Je veux vous dire, Cléonte, le sujet qui m'a fait ce matin éviter votre abord.

CLÉONTE.- Non, je ne veux rien écouter.

NICOLE.- Je te veux apprendre la cause qui nous a fait passer si vite.

COVIELLE.- Je ne veux rien entendre.

LUCILE.- Sachez que ce matin...

CLÉONTE.- Non, vous dis-je.

NICOLE.- Apprends que...

COVIELLE.- Non, traîtresse.

LUCILE.- Écoutez.

CLÉONTE.- Point d'affaire.

NICOLE.- Laisse-moi dire.

COVIELLE.- Je suis sourd.

LUCILE.- Cléonte.

CLÉONTE.- Non.

NICOLE.- Covielle.

COVIELLE.- Point.

LUCILE.- Arrêtez.

CLÉONTE.- Chansons.

NICOLE.- Entends-moi.

COVIELLE.- Bagatelle.

LUCILE.- Un moment.

CLÉONTE.- Point du tout.

NICOLE.- Un peu de patience.

COVIELLE.- Tarare*.

LUCILE.- Deux paroles.

CLÉONTE.- Non, c'en est fait.

NICOLE.- Un mot.

COVIELLE.- Plus de commerce.

LUCILE.- Hé bien, puisque vous ne voulez pas m'écouter, demeurez dans votre pensée, et faites ce qu'il vous plaira.

NICOLE.- Puisque tu fais comme cela, prends-le tout comme tu voudras.

CLÉONTE.- Sachons donc le sujet d'un si bel accueil.

LUCILE.- Il ne me plaît plus de le dire.

COVIELLE.- Apprends-nous un peu cette histoire.

NICOLE.- Je ne veux plus, moi, te l'apprendre.

CLÉONTE.- Dites-moi...

LUCILE.- Non, je ne veux rien dire.

COVIELLE.- Conte-moi...

NICOLE.- Non, je ne conte rien.

CLÉONTE.- De grâce.

LUCILE.- Non, vous dis-je.

COVIELLE.- Par charité.

NICOLE.- Point d'affaire.

CLÉONTE.- Je vous en prie.

LUCILE.- Laissez-moi.

COVIELLE.- Je t'en conjure.

NICOLE.- Ôte-toi de là.

CLÉONTE.- Lucile.

LUCILE.- Non.

COVIELLE.- Nicole.

NICOLE.- Point.

CLÉONTE.- Au nom des Dieux!

LUCILE.- Je ne veux pas.

COVIELLE.- Parle-moi.

NICOLE.- Point du tout.

CLÉONTE.- Éclaircissez mes doutes.

LUCILE.- Non, je n'en ferai rien.

COVIELLE.- Guéris-moi l'esprit.

NICOLE.- Non, il ne me plaît pas.

CLÉONTE.- Hé bien, puisque vous vous souciez si peu de me tirer de peine, et de vous justifier du traitement indigne que vous avez fait à ma flamme, vous me voyez, ingrate, pour la dernière fois, et je vais loin de vous mourir de douleur et d'amour.

COVIELLE.- Et moi, je vais suivre ses pas.

LUCILE.- Cléonte.

NICOLE.- Covielle.

CLÉONTE.- Eh?

COVIELLE.- Plaît-il?

LUCILE.- Où allez-vous?

CLÉONTE.- Où je vous ai dit.

COVIELLE.- Nous allons mourir.

LUCILE.- Vous allez mourir, Cléonte?

CLÉONTE.- Oui, cruelle, puisque vous le voulez.

LUCILE.- Moi, je veux que vous mouriez?

CLÉONTE.- Oui, vous le voulez.

LUCILE.- Qui vous le dit?

CLÉONTE.- N'est-ce pas le vouloir, que de ne vouloir pas éclaircir mes soupçons?

LUCILE.- Est-ce ma faute? Et si vous aviez voulu m'écouter, ne vous aurais-je pas dit que l'aventure dont vous vous plaignez, a été causée ce matin par la présence d'une vieille tante, qui veut à toute force, que la seule approche d'un homme déshonore une fille; qui perpétuellement nous sermonne sur ce chapitre, et nous figure tous les hommes comme des diables qu'il faut fuir.

NICOLE. - Voilà le secret de l'affaire.

CLÉONTE.- Ne me trompez-vous point, Lucile?

COVIELLE.- Ne m'en donnes-tu point à garder?

LUCILE.- Il n'est rien de plus vrai.

NICOLE.- C'est la chose comme elle est.

COVIELLE.- Nous rendrons-nous à cela?

CLÉONTE.- Ah, Lucile, qu'avec un mot de votre bouche vous savez apaiser de choses dans mon cœur! et que facilement on se laisse persuader aux personnes qu'on aime!

COVIELLE.- Qu'on est aisément amadoué par ces diantres d'animaux-là!